Tout est parti d'une photo trouvée sur Internet où l'on aperçoit une torpille. C'est bizarre une torpille sur la Seine...
Une torpille sur la Seine, mais quand, comment, pourquoi ?
Je tachais d'en savoir davantage et j'ai très vite retrouvé le cliché d'origine sur le site de la bibliothèque nationale de France.
Il s'agissait d'une photographie prise en 1909, par l'agence de presse Meurisse et qui représente la mise en marche d'une "torpille radio-télégraphique Gabet"...
Une torpille radio-télégraphique sur la Seine ?
Sur le même site, je retrouvais d'autres photos de cet engin :
Sa mise à l'eau, toujours en 1909 :
Notez la péniche à l'arrière plan, à gauche et la barque "Bibi" avec quelques dames à bord :
Et une photo de l'ingénieur Gustave Gabet, inventeur du système :
Ci-dessous, une seconde photo de la même agence de presse mais j'ai du mal à reconnaitre l'intéressé... une erreur de classement ?
Il y a également d'autres clichés, réalisés par une autre agence de presse: l'agence Rol
"Torpille dirigeable Gabet"
Le 31 août 1909 sur la Seine
Une torpille sur la Seine, mais quand, comment, pourquoi ?
Je tachais d'en savoir davantage et j'ai très vite retrouvé le cliché d'origine sur le site de la bibliothèque nationale de France.
Il s'agissait d'une photographie prise en 1909, par l'agence de presse Meurisse et qui représente la mise en marche d'une "torpille radio-télégraphique Gabet"...
Une torpille radio-télégraphique sur la Seine ?
Sur le même site, je retrouvais d'autres photos de cet engin :
Sa mise à l'eau, toujours en 1909 :
Notez la péniche à l'arrière plan, à gauche et la barque "Bibi" avec quelques dames à bord :
Et une photo de l'ingénieur Gustave Gabet, inventeur du système :
Ci-dessous, une seconde photo de la même agence de presse mais j'ai du mal à reconnaitre l'intéressé... une erreur de classement ?
Il y a également d'autres clichés, réalisés par une autre agence de presse: l'agence Rol
"Torpille dirigeable Gabet"
Le 31 août 1909 sur la Seine
Agence de presse Rol
Bibliothèque nationale de France
M. Gabet sur son canot automobile transmetteur des commandes hertziennes à la torpille dirigeable :
"Torpille radio-automatique Gabet",
Le 24/12/1909
Agence de presse Rol
Bibliothèque nationale de France
"Torpille radio-automatique Gabet",
Le 24/12/1909
Agence de presse Rol
Bibliothèque nationale de France
En parcourant quelques sites et en lisant des articles à ce sujet, j'ai à peu près cerné cette invention qui est référencée à de multiples reprises sur Internet :
Gustave Gabet était un ingénieur. Un article de la Croix Rouge Internationale le présente comme un pacifiste convaincu.
Vers 1907, il a développé et construit ce projet de torpille radio-commandée, pensant en faire une arme de dissuasion.
La construction a eu lieu dans un premier temps au Creuzot à Chalons sur Saône. On trouve d'ailleurs quelques cartes postales anciennes qui évoquent ce projet et les premiers essais. Certaines évoquent les chantiers Schneider & Cie :
Avant de présenter sa torpille à l'état major de la Marine, Gustave Gabet procède à des essais sur la Seine. Sur une barque, derrière un pupitre de son invention, il dirige à distance cette torpille qui file sur la Seine, évitant les obstacles et les piles des ponts.
Les mises à l'eau et les essais sont alors effectuées à Maison Laffitte :
"Maison Laffitte - Sartrouville, évolution sur la Seine de la torpille radio-automatique Gabet" :
"Maison Laffitte - Sartrouville, M. Gabet surveille les préparatifs de lancement de sa torpille radio-automatique":
Bien que l'endroit ne soit pas précisé, je reconnais le chantier naval Pitre & Cie que j'ai déjà rencontré sur des cartes postales anciennes et qui deviendra le chantier de Coninck & Cie :
Pour en revenir à la torpille, elle est composée d'un premier corps immergé à 1 m 50 sous l'eau, soutenu par un flotteur qui reste en surface et qui porte l'antenne radio. Elle mesure 9 m de long et peut emporter 300 kg d'explosif. Prouesse technologique de l'époque, c'est la première arme radio-télécommandée...
Mais revenons-en à l'inventeur, Gustave Galet.
Comme souvent, si l'invention est bien référencée sur Internet, l'inventeur lui y est quasi inexistant.
Bien sûr, son nom apparait lorsque les sites évoquent la première torpille radio-télécommandée mais sans plus de détails sur lui. D'ailleurs, la plupart du temps, son prénom ne figure même pas !
Il a à priori des homonymes.
L'un d'eux, lieutenant dans l'artillerie pendant la première guerre mondiale, était issu de l'école nationale des Mines de Saint Etienne :
Mais d'après un article de la Croix Rouge Internationale, notre inventeur a été rattaché à la section technique du Génie dés 1915 pour développer d'autres projets, notamment un "fortin cuirassé automobile", en un mot : un char ! Aussi ce lieutenant issu de l'Ecole des Mines de St Etienne, qui était à l'hôpital puis au front à la même époque, ne peut pas être le notre.
Un autre Gustave Gabet, à peu prés à la même époque, écrivait des livres pour l'éducation nationale : Des manuels de vocabulaire ou de grammaire...
Vers 1907, il a développé et construit ce projet de torpille radio-commandée, pensant en faire une arme de dissuasion.
La construction a eu lieu dans un premier temps au Creuzot à Chalons sur Saône. On trouve d'ailleurs quelques cartes postales anciennes qui évoquent ce projet et les premiers essais. Certaines évoquent les chantiers Schneider & Cie :
CPA de Chalons sur Saône, torpille radio-automatique, système Gabet, construite et expérimentée aux chantiers Schneider & Cie
Avant de présenter sa torpille à l'état major de la Marine, Gustave Gabet procède à des essais sur la Seine. Sur une barque, derrière un pupitre de son invention, il dirige à distance cette torpille qui file sur la Seine, évitant les obstacles et les piles des ponts.
Les mises à l'eau et les essais sont alors effectuées à Maison Laffitte :
"Maison Laffitte - Sartrouville, évolution sur la Seine de la torpille radio-automatique Gabet" :
"Maison Laffitte - Sartrouville, M. Gabet surveille les préparatifs de lancement de sa torpille radio-automatique":
Bien que l'endroit ne soit pas précisé, je reconnais le chantier naval Pitre & Cie que j'ai déjà rencontré sur des cartes postales anciennes et qui deviendra le chantier de Coninck & Cie :
Pour en revenir à la torpille, elle est composée d'un premier corps immergé à 1 m 50 sous l'eau, soutenu par un flotteur qui reste en surface et qui porte l'antenne radio. Elle mesure 9 m de long et peut emporter 300 kg d'explosif. Prouesse technologique de l'époque, c'est la première arme radio-télécommandée...
Mais revenons-en à l'inventeur, Gustave Galet.
Comme souvent, si l'invention est bien référencée sur Internet, l'inventeur lui y est quasi inexistant.
Bien sûr, son nom apparait lorsque les sites évoquent la première torpille radio-télécommandée mais sans plus de détails sur lui. D'ailleurs, la plupart du temps, son prénom ne figure même pas !
Gustave Gabet... qui êtes-vous ?
Il a à priori des homonymes.
L'un d'eux, lieutenant dans l'artillerie pendant la première guerre mondiale, était issu de l'école nationale des Mines de Saint Etienne :
Mais d'après un article de la Croix Rouge Internationale, notre inventeur a été rattaché à la section technique du Génie dés 1915 pour développer d'autres projets, notamment un "fortin cuirassé automobile", en un mot : un char ! Aussi ce lieutenant issu de l'Ecole des Mines de St Etienne, qui était à l'hôpital puis au front à la même époque, ne peut pas être le notre.
Un autre Gustave Gabet, à peu prés à la même époque, écrivait des livres pour l'éducation nationale : Des manuels de vocabulaire ou de grammaire...
Au fil des recherches, des dizaines de pages parcourus, il fallait me faire une raison : je ne trouvais aucune précision sur l'état civil et la vie de Gustave Gabet !
Quelques entrefilets dans la presse indiquaient un décès en mars 1930 :
Mais s'agissait-il du même homme ?
Dans un blog qui présente la torpille, un descendant de l'ingénieur s'est manifesté mais sans nous donner plus de détails sur l'homme qu'il était... Le mystère m'intriguait et je me demandais comment le résoudre.
Après avoir éliminé la plupart des hypothèses, je me suis dit que notre ingénieur, ayant rendu quelques services à la nation française avec ses inventions, avait sans doute été décoré de quelques médailles.
Et là, bingo ! Je retrouvais la trace de Gustave Gabet, notre inventeur. Il avait été décoré de la Légion d'honneur! Grâce à son dossier de légionnaire sur la base Léonore, j'ai pu accéder à des pièces d'archives et à des informations précises à propos de l'intéressé :
Mais s'agissait-il du même homme ?
Dans un blog qui présente la torpille, un descendant de l'ingénieur s'est manifesté mais sans nous donner plus de détails sur l'homme qu'il était... Le mystère m'intriguait et je me demandais comment le résoudre.
Après avoir éliminé la plupart des hypothèses, je me suis dit que notre ingénieur, ayant rendu quelques services à la nation française avec ses inventions, avait sans doute été décoré de quelques médailles.
Et là, bingo ! Je retrouvais la trace de Gustave Gabet, notre inventeur. Il avait été décoré de la Légion d'honneur! Grâce à son dossier de légionnaire sur la base Léonore, j'ai pu accéder à des pièces d'archives et à des informations précises à propos de l'intéressé :
Grâce au document ci-dessous, nous apprenons que Gustave Clovis Gabet, ingénieur, est né le 9 octobre 1876 à Bernay en Charente inférieure. Il a donc été nommé chevalier de la Légion d'Honneur le 4 février 1921 par le ministre de la guerre. Ce feuillet nous apprend également sa date de décès : le 20 mars 1949 dans la zone de la préfecture de Nice.
Sur le document ci-dessous, nous pouvons voir la signature de Gustave Gabet, en bas à gauche :
Le document suivant n'est ni plus ni moins que l'acte de naissance de notre ingénieur ! Nous faisons un bond dans l'Histoire puisque nous voici en 1876 : Clovis Gabet, cultivateur de 27 ans, vient déclarer la naissance de son fils Gustave à la mairie de Bernay, le 9 octobre 1876. La mère se nommait Marie-Thèrése Merlet, ménagère de 23 ans. Deux témoins signent l'acte de naissance : Jules Géraudeau, instituteur de 22 ans et Edouard Chevalier, cultivateur de 27 ans. Notons qu'il est précisé que le père, Clovis, n'a pas pu le faire, ne sachant pas signer. Quelle belle revanche du fils qui sera ingénieur !
L'extrait de casier judiciaire de notre ingénieur, vierge :
Le feuillet suivant, l'enquête de moralité, comporte d'autres informations intéressantes :
- son adresse à Paris, 30 bis boulevard Jourdan;
- qu'il est l'inventeur en 1909 de la torpille radio automatique, bon, ça on le savait déjà ;
- qu'il a été réformé, attaché à titre officieux pendant la durée de la guerre successivement à la direction du Génie (STG) puis au service automobile (STAu) et à la direction des inventions (commission des transports de combat);
- qu'il a été l'auteur de différents engins de combat et de ravitaillement ;
- qu'il a été professeur de classes élémentaires à Rochefort sur ? de 1898 à 1907;
- qu'il a été ingénieur-électricien à Paris de 1907 à 1919 ;
- qu'il a été membre de commissions militaires comme la commission technique des applications militaires de l'électricité (Génie) et de la commission pour l'étude des transports de combat (armement) ;
- qu'il a été l'auteur d'ouvrages classiques (lecture) publiés chez Hachette ;
- qu'il était officier d'académie.
Hourra, hourra !
Pour un illustre inconnu quelques lignes plus haut, nous avons tout de même une bonne connaissance de Gustave Gabet maintenant, ingénieur, professeur et auteur :)
Quelques articles relevés ici et là abordent plus abondamment ses inventions, surtout la fameuse torpille radio guidée mais c'est fini, nous n'en apprendrons pas davantage sur l'homme :
Un article de la revue La Nature, disponible sur le site du CNAM, aborde les essais de la torpille à Châlons sur Saône :
La France Illustrée: journal littéraire, scientifique et religieux
N° 1787 du 29/02/1909 :
Le Journal
Edition n°5984 du 13/02/1909
Le Radical
Edition n°45 du 14/02/1909 :
L'Ouest Eclair
Edition n° 3886 du 03/09/1909 :
Le XIXe siècle : journal quotidien, politique et littéraire
Edition n° 14535 du 27/12/1909 :
Bonjour,
RépondreSupprimervous avez fait un super boulot ! Merci
Je suis aussi collectionneur de carte postale, cette histoire de torpille est passionnante, sur delcampe il y a un article de la presse anglaise qui en parle. Sur la photo du chantier au fond vous pensez que c'est le pont du Pecq ? Sur quelle rive (Gauche ou droite) se trouve le chantier Pitre & Cie selon vous ?
Cela pourrait être interressant de faire un lien depuis http://odela.eu/ vers cette histoire, il s'agit d'un guide fluvial ? Sam contact@odela.eu (vous avez une adresse perso ?)
Very creative post
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