Libellés

Affiche (6) Alerte (5) Aménagement (26) Animaux (128) Annonce (48) Astuces (20) Bateaux (293) Blog (9) Bricolage (44) CPA (28) Démarches (14) Fêtes (6) Gourmandises (4) Histoire (195) Humour (8) invention (8) Journal (49) Livre (2) Météo (103) Navigation (45) Pêche (7) Personnage (2) Photos (197) Photos anciennes (173) Pourquoi (16) Recherches (5) Rencontre (22) Sortie (15) Sport (9) Traditions (65) Travaux (26) Vidéo (29) Vie à bord (218) Visite (24)

vendredi 28 décembre 2018

Un narrowboat à vendre à Auxerre : Le PASTURES BLUE




Une petite annonce vient d'être publiée sur le boncoin.fr pour un narrowboat, il n'y en a pas beaucoup à vendre ces derniers temps.

L'annonce est visible ici.

Il s'agit d'un 17,68 m, c'est à dire un 58 pieds pour rester dans les mesures anglaises. On le connait déjà puisqu'il s'agit du Pastures Blue, un bateau construit en 1989 qui avait déjà fait l'objet d'articles sur ce blog en 2014 :  et là.




Pas beaucoup de nouvelles informations et les photos sont à demander.
Je ne vais pas développer de nouveau le sujet, le principal étant déjà dans l'autre article. 

Souhaitons bonne vente à l'actuel propriétaire !

mercredi 26 décembre 2018

Des couteaux...





Il y a des objets qui vous attirent sans que vous ne sachiez pas vraiment pourquoi et c'est un peu le cas pour moi avec ce modèle de couteau.


(Photo issue du site http://www.farol.fr)


C'est vrai qu'à la base, j'aime bien les couteaux, j'en ai plusieurs dont toujours un, à la ceinture, dans son étui. Pour autant, je ne suis pas collectionneur et il n'est pas question d'en avoir plein les tiroirs.

C'est au salon Nautic, il y a déjà plusieurs années, que j'avais vu un artisan vendant sa production. Le lien avec le nautisme, c'est que étant lui-même régatier, Sylvain Berthommé propose des couteaux de marin : de quoi faire des épissoires, démaniller, etc. Il les produit à La Rochelle sous sa marque : Farol.

Son premier couteau, le Cachalot, a été fait à bord d'un bateau, sculpté dans un morceau de teck. Comme son nom l'indique, il est en forme de cachalot :


(photo du site http://www.farol.fr)




Et c'est ce modèle qui me plait. Je voulais avoir de beaux couteaux pour la table, pliants, histoire de mettre en retraite les rustiques Opinel qui n'ont pourtant pas démérité mais qui seront maintenant destinés à être utilisés en cuisine.
Bien sûr, cela a un coût et il pourra paraitre prohibitif à ceux qui ne sont pas amateurs, mais c'est dans tous les domaines pareil.
Et puis comme le dit la réplique d'un film culte : "le prix s'oublie, la qualité reste !". J'ai donc craqué cette année pour deux couteaux après les avoir admirés et soupesés plusieurs années de suite.

En matière de qualité, la lame est en acier suédois, du 12c27, appelé Sandvik du nom de la société qui le produit. A la base, il était surtout destiné à la fabrication des lames de rasoir. Il est très coupant pour un inox et il s'affute facilement même si, de réputation, son fil a tendance à ne pas tenir des années.
De toute façon, c'est souvent le cas des couteaux destinés à servir à table car la faïence de l'assiette est destructrice pour le fil des lames.

Pour ce qui est des bois, j'en ai choisi deux très différents : un sombre, du wengé et un clair, du buis. 






La prise en main est terrible, la paume de la main épouse très bien ses courbes. J'adore sa forme et la fin du manche qui se termine en queue de poisson !



Je passe sur son système d'ouverture et de blocage (liner lock),  je précise juste qu'il est interne, semble solide et un peu difficile à manoeuvrer lorsqu'il est neuf.


Enfin, j'ai essayé de faire quelques photos, difficiles à cause des reflets sur la lame en inox !
Sur les photos un peu plus haut, vous remarquerez que la lame a été gravée. Il y a bien sûr le logo choisi par l'artisan : un phare. Farol en portugais, le nom adopté par la marque.
Et puis de l'autre côté, Sylvain a personnalisé les deux couteaux en gravant le nom de notre bateau et il a dessiné la forme du narrowboat.




Au final, je ne lui trouve qu'un petit défaut, esthétique : il s'agit de la rupture entre la ligne de la lame et celle du manche mais c'est vraiment un détail. Le Cachalot est vraiment un beau couteau, je suis content d'en avoir maintenant à bord et de pouvoir l'utiliser au quotidien.



Source :
- http://www.farol.fr/catalogue-couteaux-farol

samedi 1 décembre 2018

L'automne est bien là





Sale temps pour cette fin de novembre et ce début du mois de décembre !
Des nuages, de la pluie, du vent... 
Heureusement, les températures ne sont pas très basses.

Essai de photographie avec mon téléphone portable :


mercredi 7 novembre 2018

Le Narrowboat DREAM ON prend ses quartiers d'hiver




Pour l'hiver, nous avons changé de place d'amarrage. Le narrowboat DREAM ON est maintenant tout au fond du port, près de la cale de mise à l'eau.
Pourquoi ce lieu d'hivernage ?
Parce qu'il est beaucoup mieux exposé que notre place habituelle : le flanc du narrowboat est au soleil dés la fin de la matinée et pour tout l'après-midi. Sa couleur sombre absorbant la chaleur, le moindre rayon de soleil réchauffe notre coque en acier. 
Outre la température intérieure, cela change également l'éclairage et l'ambiance intérieure est beaucoup plus lumineuse.








Et en plus, la vue est dégagée, même la nuit ! :)

mardi 30 octobre 2018

"Louise Catherine", le chaland de l'Armée du Salut





(Photo Presse Jean Roubier, Delcampe.fr)



A ma connaissance, il est toujours en partie immergé dans la Seine après la crue de février 2018.

"Il" ? c'est le bateau "Louise-Catherine", ancien refuge de l'armée du Salut. Il a défrayé la chronique au moment de son naufrage, beaucoup de médias l'ont évoqué et, comme souvent, les raccourcis et légendes urbaines ont foisonné. A force de vulgarisation, la précision des informations s'est émoussée, aussi j'ai voulu remonter le temps au fil d'anciens journaux pour connaitre sa véritable histoire, même s'il y avait sans doute déjà à l'époque quelques erreurs dans la presse.


Alors, c'est parti : mettons en marche la machine à remonter le temps. Les lecteurs les plus avertis me pardonneront l'utilisation du mot "péniche" alors qu'il s'agit bien d'un chaland, j'ai repris en effet le vocabulaire de la presse et des différentes sources.

Le premier article que j'ai trouvé au sujet de ce bateau date du 8 juin 1929. Il est paru dans le journal Comoedia et il aborde le financement d'un asile flottant pour les "sans taudis". L'auteur de l'article, qui n'est pas nommé, trouve qu'il s'agit d'une bien jolie idée et félicite l'Armée du Salut et son dévoué commissaire général M. Albin Peyron. Cette idée, c'est l'aménagement d'un asile flottant destiné à recevoir l'hiver les malheureux qui errent la nuit autour des Halles ou qui s'étendant sur les berges de la Seine pour dormir. Le comité d'honneur des oeuvres sociales de l'Armée du Salut vient de donner son agrément à la création de cet asile flottant.
Le ministre des Travaux publics a donné un chaland de 70 m de long sur 8,40 m de large. Il sera transformé en asile et il pourra recevoir 150 personnes avec le confort nécessaire. Pour couvrir les dépenses, évaluées à 200 000 francs, le comité d'honneur organise une soirée de gala où chacun pourra apporter son obole. Elle aura lieu le 13 juin 1929 à 21h à la grande salle Pleyel...








Le 2 janvier 1930, l'Ouest-Eclair annonce sur sa première page l'ouverture du premier asile flottant et publie une photo que nous retrouvons dans plusieurs autres quotidiens. Le journaliste, un peu optimiste, prétend que le bateau ira de ville en ville :




Le 10 janvier 1930, les Cahiers de la santé publique publient un article à propos des différents projets et réalisations de l'Armée du Salut, notamment l'ouverture depuis le 1er janvier  de l'asile flottant "Louise-Catherine" qui peut accueillir 150 sans abris chaque nuit.



(Photo www.delcampe.fr)



Le 22 mai 1930, le journal L'Intransigeant aborde la semaine de la bonté et annonce qu'un diner sera donné aux sans-abris sur la péniche de l'Armée du Salut, qui sera illuminée pour l'occasion.

Le 30 juillet 1930, le journal L'Homme Libre publie un article sur l'Armée du Salut et ses oeuvres. Il aborde ainsi la péniche de l'Armée du Salut, Louise-Catherine, qui a fourni 20 000 nuits aux "sans-taudis" de la capitale. Ce bateau a été transformé pour l'été en colonie flottante. Après des travaux de peinture et de réfection, ce grand bateau a été remorqué au pont du Pecq, face à la forêt de Saint Germain. 100 jeunes gens ont pu y être reçus simultanément. Natation sous surveillance, excursions, tout est calculé pour offrir aux jeunes apprentis et ouvriers de la capitale quelques jours de vacances idéales.

Le 13 août 1931, le journal Paris-Soir publie un long article à propos de la clientèle de notre asile flottant. Il se trouve avec les pièces jointes en bas de page et je vous laisse le lire car il détaille les types de personnes qui viennent dormir à bord et on peut être surpris. Concernant le bateau, hélas, les détails sont moins nombreux : il y a toutefois une photo où nous apercevons la devise sur la roue du gouvernail et nous apprenons que cet asile se trouve en cet été à Charenton, amarré sous le pont de Conflans. Ainsi, il laisse sa place habituelle sur la Seine devant le Palais Royal aux baigneurs.






Le 8 janvier 1932, l'hebdomadaire illustré L'Africain publie un article intitulé l'asile flottant, de Mainick Ar Rouz, qui nous narre une visite de la péniche de l'Armée du Salut. Nous y apprenons que le bateau est amarrée au quai du Louvre depuis bientôt deux ans: Une fois franchie la passerelle, il y a dans l'entrée une table sur laquelle se trouve un gros registre. C'est sur ce registre que vous êtes inscrits si vous désirez passer la nuit sur le "Louise-Catherine" et que vous disposez d'une carte d'identité. Cette dernière serait d'ailleurs la bête noire des clochards qui ne la veulent pas ou ne peuvent pas l'avoir. On y apprend qu'il est demandé la "modique somme de 1,50 (?) pour avoir un lit".
Quelques marches plus bas, c'est le réfectoire. Il est très propre et comprend quatre tables recouvertes de toile cirée. Une ardoise au mur indique le tarif des plats : de 0,30 la soupe chaude et grasse, à 1,50 ragouts et viandes. Une salutiste (jeune fille de l'Armée du Salut) sert de guide au narrateur et lui présente les détails pratiques de l'installation. Après le réfectoire, ils passent dans un dortoir clair et bien chauffé par des radiateurs. De chaque côté de la pièce, il y a des lits superposés comme des couchettes de paquebots, avec matelas, draps "blancs comme pour les mariés" et deux couvertures de laine. Il y a aussi une petite armoire pour chacun, une chaise de fer. Au milieu du dortoir se tiennent les lavabos en zinc, à eau courante. La jeune fille lui vante le luxe des couches du bord.
A l'arrière du bateau se trouve un autre dortoir : celui des "2ème classe". Là sont conduit les hôtes d'une propreté douteuse. Chaque matelas est recouverte d'une toile cirée noire et la couverture est également doublé de ciré. Si l'un des pensionnaires désire passer la nuit suivante dans l'autre dortoir, il lui faut revenir à l'asile flottant muni d'un bon de propreté signé par le service d'hygiène auquel il aura du se confier.
Pendant la visite, la nuit est tombée et le froid est devenu glacial. Le bateau est vide dans la journée mais déjà sur la berge du fleuve, bien avant l'heure, une trentaine de malheureux attendent l'ouverture de l'asile.


En mai 1932, le Petit Parisien annonce dans ses "échos" que la péniche de l'Armée du Salut, située au Pont Solférino, accueille à 19h pour un repas les sans-abris et les chômeurs.

En juillet 1934, Etudes, la revue catholique d'intérêt général, publie une courte narration de la visite de la péniche qui est amarrée près du pont de Solférino. Elle peut abriter pour la nuit 150 clochards. L'installation intérieure est décrite comme admirable et d'une propreté méritoire. Il y a trois dortoirs (chaque lit étant muni de son armoire), une salle de restaurant, une salle de douches. Le bateau est éclairé à l'électricité. Il est équipé du chauffage central, de larges baies vitrées que l'on peut abaisser et par où pénètre l'air salubre du fleuve. La nourriture est de l'aspect le plus appétissant et les portions sont abondantes. Un dîner à la portion coûte 0,60 francs à 1,50 francs, le café et le pain sont servis pour 0,60 francs, la soupe et le pain pour le même prix. Pour la nuit, le prix du lit est de 1,50 francs en deuxième classe (sans draps) et de 2 francs en première classe (avec draps).
Sur le pont de la péniche, il y a deux terrasses avec bancs, tables, plantes vertes, à la disposition des clochards qui pourraient y prendre le soleil. Cependant, l'auteur de l'article remarque que ces terrasses restent désertes et que les clochards restent sur le quai, tassés le long du mur. Ils préfèrent le quai, qui reste leur domaine. De la péniche, ils n'attendent qu'une pitance et un lit.
D'un bout à l'autre de l'année, la péniche héberge quelques 2 500 clochards.

Le 20 février 1936, le journal L'Humanité publie une photo de chômeurs mangeant leur soupe sur la péniche de l'Armée du Salut.





En janvier 1937, la revue illustrée de l'aéronautique publie une carte où la péniche est amarrée près du Pont de Solférino : 




Le 28 juillet 1938, lors de la visite du roi Georges VI à Paris, le journal Le Matin précise que la péniche de l'Armée du Salut avait pour l'occasion tendu sur ses flancs un calicot avec l'inscription "Salvation Army". Elle était toujours amarrée près du Pont de Solférino.

Curieusement, entre 1939 et 1956, je n'ai trouvé aucun article de journal abordant ce bateau de l'armée du Salut. Bien sûr, il y a eu la seconde guerre mondiale et la presse a eu d'autres sujets à traiter mais jusqu'en 1956 ?!?!?

Heureusement en avril 1957, une publication "Informations sociales : bulletin mensuel à l'usage des services sociaux / Union des caisses d'allocations familiales" va nous apporter beaucoup d'éléments sur l'histoire du bateau qui nous intéresse :


L'auteur de l'article intitulé "La péniche de l'Armée du Salut" fait état d'un long bateau de ciment, amarré au quai Saint Bernard et qui porte en gros caractères "Armée du Salut". Il décrit l'endroit comme un asile flottant où peuvent se réfugier tous les malheureux qui ne possèdent rien et qui sont contraints de passer la nuit à la belle étoile. Depuis des années, la péniche de l'Armée du Salut reçoit ainsi les clochards qui savent y trouver toujours un bon accueil, un soupe chaude et un lit. Certains préfèrent toutefois rester dehors même par les froids intenses. Il y a plusieurs raisons à cela : tout d'abord, l'inscription obligatoire de ceux qui passent la nuit sur la péniche. Cela fait hésiter ce qui ont eu quelques démêlés avec la police. Ensuite, d'autre reconnaissent qu'après avoir eu chaud la nuit dans la péniche, le froid de la journée leur semble plus dur à supporter. Enfin, la péniche n'est qu'un centre de dépannage et ne peut servir indéfiniment de lieu de refuge à certains. D'autant qu'il ne demandait aucune contribution à ceux qui sont abrités.
C'est Mademoiselle Gogibus, commissaire de l'Armée du Salut, qui dirige la péniche depuis quelques années. Elle précise que le bateau est amarré depuis 1950 au quai Saint Bernard, près du pont d'Austerlitz. Avant la guerre, elle était au quai des Tuileries ou encore au Pont Neuf.
L'histoire de cet asile flottant est racontée par la commissaire Blanche Peyron (1) : A la fin d'une froide journée d'hiver, elle fit la connaissance de celle qui sera l'inspiratrice de l'arche du salut. C'était une artiste peintre qui n'avait jamais été riche, qui connaissait les difficultés de la vie et qui en avait souffert. Peu de jours avant, elle avait reçu une somme d'argent qu'elle n'attendait pas. Elle apportait cette somme pour les clochards, dans une enveloppe qu'elle déposa sur le bureau de la commissaire Peyron.
Dans la discussion, elle demanda à la responsable si n'était pas possible de faire quelque chose de plus, car il y avait toujours des sans-abris sous les ponts. Mme Peyron lui répondit qu'elle le voudrait bien mais que son organisation ne trouvait pas d'immeuble, ni de terrain. L'artiste lui demanda alors si elle avait pensé à une péniche, à une péniche désaffectée. Mme Peyron trouva l'idée merveilleuse et elle en parla à son mari, également commissaire, qui se mit en quête d'une péniche le soir même.
Ce fut l'ordre du jour : on en parlait, on en cherchait et, finalement, le ministère des travaux publics mit à disposition, pour une somme purement nominale, un chaland en ciment armé, long de 75 m, large de 8 m, construit avec quelques autres exemplaires pendant la première guerre mondiale afin de ravitailler Paris.
Transformé et aménagé en refuge, le chaland fut inauguré le 2 janvier 1930 pour y recevoir les sans-logis.
On l'appela Péniche "Louise-Catherine" en souvenir de Louise-Catherine Breslau (2), artiste-peintre bien connue, amie de la première donatrice.
Avant la seconde guerre mondiale déjà, elle recevait pendant la mauvaise saison les pauvres gens sans abri et l'été, remorquée le long de la Seine, elle devenait une colonie de vacances et même un but d'excursion pour ceux qui voulaient y passer un dimanche en banlieue.
En 1940, l'occupant allemand la réquisitionna pour y soigner des blessés. Elle fut ensuite occupée par différents groupements à la recherche de logement. Ce n'est qu'en février 1950 qu'elle revient à sa destination sociale. De nombreuses réparations y furent effectuées et on installa l'eau, l'électricité et le téléphone. Avec ces branchements, il n'était évidement plus question de la changer de place.
Elle était ouverte d'octobre à juin et on profitait de la fermeture annuelle pour y faire les réparations et améliorations nécessaires. 
En six ans, elle accueillit environ 30 000 hommes pour un séjour de quelques jours ou de quelques semaines. L'accueil était gratuit et comprenait le lit, la soupe du soir et du matin. Il y avait 125 places réparties en lits superposés avec des matelas Dunlopillo, draps et couvertures.













Lors des périodes d'affluence, les hommes trop nombreux sont couchés par terre, entre les lits ou allongés dans le réfectoire, sur les tables, les bancs et même sur les marches de l'escalier.
Dès son ouverture en 1950, il avait été décidé que la Péniche serait un centre de dépannage pour les hommes dans la difficulté, leur permettant de tenir le coup en attendant des jours meilleurs (travail, maison de retraite, retour au foyer, etc.) et d'être hébergé dans un des hôtels de l'Armée du Salut. Tous les soirs, il y en avaient des nouveaux qui franchissaient la passerelle pour accéder au bateau, sans autre condition que de passer par le "bain d'épuration" à l'hôpital Cochin pour les plus sales d'entre eux.


(1) Blanche Peyron est en fait Blanche Roussel, née le 8 mars 1867 à Lyon, fille de Napoléon Roussel (écrivain et défenseur du mouvement protestant dans les Cévennes) et Mary Stuart, une écossaise de naissance. Elle entra à l'école des officiers de l'Armée du Salut en 1886 et véritable âme de l'oeuvre française de l'Armée du Salut, elle en devint commissaire générale. Elle épousa, le 30 avril 1891, Albin Peyron qui dirigeait alors le poste de l'Armée du Salut de la rue Auber à Paris. Après avoir tenté de réduire la misère toute sa vie, cette bonne âme s'est éteinte le 21 mai 1933 à Paris. Elle était chevalier de la Légion d'Honneur.


(Photo extraite des Dimanches de la femme,
supplément de la Mode du Jour, édition du 9 juillet 1933)


(2) Louise-Catherine Breslau, de son vrai nom Maria Luise Katharina Breslau, est née à Munich le 06/12/1856 et décédée à Neuilly-sur-Seine le 12/05/1927. Elle était une artiste peintre allemande, naturalisée suisse. Elle a été la troisième femme et la première non française à être décorée de la Légion d'Honneur.

Cette version de l'origine du bateau publiée dans la presse en 1957 correspond à la version disponible sur un site Internet dédié à Marie Baskirtseff, une autre artiste peintre.  Les deux femmes, rivales, avaient étudié la peinture dans le même cours, l'académie Julian, une école privée de peinture et de sculpture située à Paris. Dans cette académie, Louise Breslau va rencontrer une autre étudiante en peinture, Madeleine Zillhardt. Partageant les mêmes goûts en peinture, arts et littérature, les deux femmes entameront une relation qu'elles poursuivront tout au long de leur vie. Madeleine Zillhardt fut la fidèle compagne, la muse, le modèle et le défenseur de Louise.  A la mort de cette dernière, Madeleine qui sera sa légataire universelle, n'aura de cesse que de rendre hommage à Louise et de perpétuer sa mémoire. Elle a fait de nombreux dons à des musées, ce qui a permis de ne pas disperser l'oeuvre de Louise
Le site en question raconte brièvement la rencontre de Madeleine avec Blanche Peyron, la responsable de l'Armée du Salut. 

En décembre 1928, l'année suivant la disparition de Louise, Madeleine aurait acheté un dessin pour la modique somme de cent sous. Un marchand le lui rachetera 1 500 francs. C'est cette somme qu'elle n'attendait pas qu'elle remettra à Blanche Peyron. Comme nous l'avons vu plus tôt, c'est donc à cette occasion, au cours de la discussion, que Madeleine Zillhardt aurait donné l'idée à la responsable de l'Armée du Salut d'acquérir une péniche comme lieu d'accueil pour les plus démunis. C'est l'architecte Le Corbusier qui sera chargé des travaux de transformation du chaland de béton en asile flottant. Le site précise que ce sera sous le mécénat de Winnaretta Singer, princesse de Polignac (1865 - 1943).
La devise du bateau devint Louise-Catherine, en hommage à l'artiste.

Les quelques 1500 francs donnés pour les malheureux et l'idée donnée à l'Armée du Salut d'acquérir un bateau auraient suscité un tel hommage ? Peut-être... ou bien Madeleine, fidèle à son devoir de mémoire, a-t-elle fait un don plus important ?
Mais cela restera entre les deux femmes présentes lors de la rencontre :)

(CPA www.delcampe.fr)



L'ancienne devise !


Ce bateau disposait d'un site qui lui était dédié (http://www.peniche-lecorbusier.com), hélas, il n'est plus en ligne. J'ai cependant une partie de l'histoire qu'il contait :

Le bateau Louise-Catherine portait initialement la devise "Liège". Long de 68 m et large de 7,88 m, il fut construit en 1919 (1) au chantier d'Amfreville dans l'Eure pour l'Office Nationale de la Navigation (ONN). Liège appartenait à un ensemble de bateaux en ciment armé qui comptait des chalands, des remorqueurs et des pontons flottants équipés de grues. Les chalands portaient le nom de villes européennes, les remorqueurs le nom d'états américains. Cette flottille avait été construite dès la fin de la première guerre mondiale, grâce à l'aide américaine, pour transporter le charbon anglais du Havre à Paris. 
Le site narrait l'épisode de Madeleine et de son dessin acheté cent sous et sa rencontre avec Blanche Peyron.
Ayant fait sienne l'idée de l'asile flottant, l'Armée du Salut s'est mise en quête d'un bateau et découvre le chaland Liège à l'abandon dans le port de Rouen. 
En mars 1929, cette oeuvre rachète le chaland à l'ONN. Sa devise devient Louise-Catherine en hommage à l'artiste Louise-Catherine Breslau, compagne disparue de Madeleine Zillhardt.

(1) Il est à noter que le site Wikipedia avance 1915 comme année de construction du chaland Liège. Je vais rester volontairement sur la date de 1919 donnée par le site qui gérait le bateau...

D'après un article de 2008 rédigé par Michel Cantal-Dupart (architecte, professeur au CNAM, et président de l'association Louise Catherine), anciennement disponible sur le site de la péniche de le Corbusier : "... Tout a commencé en 1926 lorsque la princesse Winaretta Singer-Polignac lui  commande une villa sur un terrain de Boulogne-Billancourt, puis Neuilly-sur-Seine. Ce projet ne sera jamais réalisé mais, simultanément, la princesse mécène impose Le Corbusier à l'Armée du Salut pour réaliser l'annexe du Palais du Peuple rue des Cordelières, dans le XIII° arrondissement de Paris. Le projet de villa servira de matrice en 1926 pour la villa Stein et en 1928 pour la villa Savoye qui est une oeuvre manifeste : pilotis, plan tramé, toit terrasse, façades libres, promenades architecturales génératrices de perspectives.
Pour bien comprendre l'importance de la Louise-Catherine, il faut se pencher sur la villa Church (1927) où Le Corbusier dit "créer dans le crée" et opère une réhabilitation agrandissement.
"1929 est une année très importante : celle de la réalisation de la villa Savoye, de la première grande commande publique : le Palais du Centro-Soyous à Moscou et la tenue de dix conférences publiques à Buenos-Aires en Argentine. Il vient de créer le CIAM avec le directeur du Bauhaus de Weimer, dessine "sa maison" et publie ses oeuvres complètes. L'aménagement de l'asile flottant synthétise ses vingt premières années professionnelles. Il crée dans le créé, potentialise cette barge en béton, oeuvre déjà innovante. Il se sert des varangues qui forment des alvéoles pour constituer des casiers, crée des soupentes pour casser le volume. Dans le relevé que nous avons effectué, nous avons remarqué que ces soupentes étaient disposées à 2,25m du plancher et réservent une hauteur de 1,83 m entre le plancher et le plafond. Les escaliers conduisant à ces soupentes sont dans l'axe des nefs, il fait porter le plafond par 36 pilotis, perce deux cloisons étanches selon une perspective décalée qui constitue une véritable promenade architecturale et crée trois jardins sur les trois terrasses. La destination pour les sans-adresse complète tout le travail conduit depuis les études sur la maison dom-ino et la maison minimum."
Les plans du Louise-Catherine paraitront en 1934 dans le volume 2 de l'oeuvre complète. En introduction, Le Corbusier écrit : "le hasard avait fait que le premier tome paru en 1929, cette année était encore en quelque sorte pour nous la fin d'une longue série de recherches... Qu'avons nous fait pendant ces années 1929 - 1934 ? Quelques bâtiments d'abord, puis beaucoup de grandes études d'urbanisme. Ces bâtiments ont joué le rôle de laboratoire. "



Urbanisme, architecture... cela me permet de faire la transition vers un autre site, toujours accessible celui-ci : http://projets-architecte-urbanisme.fr. Essentiellement accès sur l'oeuvre de Le Corbusier, nous y trouverons quelques informations utiles même si certaines semblent erronées, par exemple le site affirme qu'il s'agit d'un asile psychiatrique et que la bateau s'appelle Louise-Catherine en hommage à Louise-Catherine Breslau car elle aurait participé au financement... 

Si l'aspect historique est donc mal renseigné, peut-être la partie abordant le futur du bateau est plus juste : le site d'architecture cité plus haut rappelle que l'asile flottant est fermé depuis 1994 pour des raisons de sécurité. Selon un autre site (http://www.patrimoine-environnement.fr/), sa coque prenait l'eau.  
Fortement délabrée, elle a été rachetée en 2006 par l'association Louise-Catherine, créée à cette occasion, qui souhaite la restructurer en centre dédié à l'architecture. La restauration devrait être assurée par l'agence ACYC Architectes et la réalisation de la structure métallique est assurée par l'architecte Shuhei Endo. Celui-ci réalisera une oeuvre monumentale en métal nommée Springtechture, qui enveloppera la péniche Louise-Catherine pendant la durée des travaux, soit environ deux ans. Les travaux débuteront par la création de couverture de chantier. L'aménagement qui suivra comprendra trois nouvelles nefs en béton armé, ainsi que de nouveaux accès permettant l'entrée du public, notamment des personnes à mobilité réduite.
Outre les quelques informations relevées, ce site d'architecture à l'avantage d'avoir conservé les photos qui figuraient sur le site de la péniche Le Corbusier et que l'on retrouve aussi sur le site de la fondation du même nom:

Photos de 1929 :

(Photo du site http://projets-architecte-urbanisme.fr)

(Photo du site http://projets-architecte-urbanisme.fr)


Le projet :

(Photo du site http://projets-architecte-urbanisme.fr)

(Photo du site http://projets-architecte-urbanisme.fr)

Photo (AFP) du bateau dans les années 2000 :

(Photo du site http://projets-architecte-urbanisme.fr)



L'asile a été fermé en 1994 pour des raisons de sécurité selon un des sites précédemment consultés. Il est à noter que 1994 correspond également à une date historique pour l'Armée du Salut : pour distinguer l'action sociale et l'oeuvre d'évangélisation, elle adopte de nouveaux statuts. Ainsi, la congrégation de l'Armée du Salut, regroupant l'ensemble des officiers va poursuivre sa mission spirituelle et évangélique tandis que l'AOFBAS va continuer à gérer les logements sociaux. L'AOFBAS est l'association des oeuvres françaises de bienfaisance de l'Armée du Salut, créée en 1931 et reconnue d'utilité publique. Elle permettait de recevoir des dons et legs.

En 2006, le bateau est racheté par des particuliers qui veulent lui redonner vie et une association Louise-Catherine est créée, présidée par Michel Cantal-Dupart. L'objectif est de transformer le bateau en musée, en lieu d'exposition centré sur l'architecture. Le budget nécessaire est énorme : 1, 2 millions d'euros et la DRAC, la mairie de Paris, celle du 13ème arrondissement et la fondation Le Corbusier en sont les principaux soutiens.

La péniche est classée monument historique de la ville de Paris en 2008. Actuellement, sa propriétaire serait Alice Kertekian, selon le magazine Figaro.

Le 10 février 2018, lors d'un épisode de crue de la Seine, plusieurs médias annoncent que ce bateau de 800 tonnes, qui devait être restauré et venait d'être remis à l'eau, sombre en une vingtaine de minutes et repose pour le moment au fond de la Seine. L'accident viendrait du fait qu'avec la décrue, l'avant du bateau a reposé sur le quai tandis que le niveau de l'eau baissait. Une intervention permettra de remettre le bateau à l'eau mais il a coulé dans la foulée, sans doute victime d'une voie d'eau.

Photos : © Radio France / Solène Cressant






Au mois d'avril, après la décrue de la Seine, le toit et la partie haute du bateau ont émergé mais depuis, les médias se font discrets à son sujet. Le président de l'association estime les travaux de renflouement à 150 000 euros et les mécènes doivent aussi se faire discrets car le bateau est toujours au fond de l'eau. Souhaitons-lui que le genre humain ne se montre pas ingrat au vu des services qu'il a rendu.


(Photo issue du site http://www.patrimoine-environnement.fr)
(Photo issue du site http://journal.alinareyes.net)
(Photo issue du site http://journal.alinareyes.net)
(Photo issue du site http://journal.alinareyes.net)



(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)

(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)
(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)
(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)
(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)
(Photo issue du site https://www.flickr.com/photos/jsebmaur)


Archives :


8 juin 1929 :






2 janvier 1930 :







10 janvier 1930 :





22 mai 1930 :






30 juillet 1930 :






13 août 1931 :









8 janvier 1932 :





21 mai 1932 :





Juillet 1934 :








Février 1936 :





Janvier 1937 :










Informations sociales : bulletin mensuel à l'usage des services sociaux / Union des caisses d'allocations familiales (avril 1957) :







Sources :

- http://gallica.bnf.fr
- http://www.bashkirtseff.com.ar
- https://fr.wikipedia.org
- http://www.peniche-lecorbusier.com
- http://www.patrimoine-environnement.fr/
- http://www.fondationlecorbusier.fr
- http://projets-architecte-urbanisme.fr
- https://www.armeedusalut.fr
- https://www.connaissancedesarts.com